S’impliquer pour les jeunes

En ce beau samedi d’automne, je participai à un panel sur la santé mentale des jeunes organisé par le service aux étudiants de McGill .   Moi et 3 autres participantes, Elizabeth Cawley, Sarah Berry et Patricia Lemoine, explorions la notion d’advocacy en ce qui a trait à la santé mentale des jeunes.

Voici donc, en rafale, les questions auxquelles j’ai répondu.

Être lobbyiste pour les jeunes et leur santé mentale
Pourquoi impliquer les professionnels de la santé dans la sensibilisation de la population envers la santé mentale des jeunes?
Déjà, le simple nombre de cliniciens présent dans plusieurs sphères de la société est un bon indicateur pour leur implication.  De plus, on sait que les maladies mentales représentant un impact majeur sur la santé et la qualité de vie (schizophrénie, le trouble bipolaire, le trouble alimentaire ou de personnalité) auront présentées des symptômes importants chez le jeune adulte âgé de 24 ans et qu’il aura demandé de l’aide auprès de professionnels.   Le suicide et la 2e cause de décès chez les jeunes, juste derrière les accidents de la route.  En sachant que plusieurs de ces accidents sont liés à la consommation chez les jeunes ou encore une conduite dangereuse, cela ne fait que souligner encore plus le besoin des divers intervenants de la santé de s’intéresser à cette partie de la population.
Une plus grande implication des autres intervenants, les enseignants, les décideurs est-elle nécessaire? Une impression de ne pas être outillés est présente chez plusieurs enseignants et ce dès l’école primaire.  Toujours aussi ce manque d’intérêt pour la maladie mentale, pas très glamour.   Je dirais aussi que  les gens qui ont souffert ou souffre à cause de la maladie mentale devraient surtout prendra la parole.   Des artistes, de chefs d’entreprise qui se montrent, le visage à découvert, est un des meilleurs moyens de rejoindre ceux qui s’isolent et de normaliser et sensibiliser la population à ce genre de difficultés, les jeunes en particulier.
Pourquoi parlez de l’empowerment de ceux qui ont des problèmes de santé mentale dans votre blogue ? Régulièrement, au Crossroads, nous sommes témoins à tous les jours de la plus grande efficacité du message d’un des membres du groupe comparé à celui des intervenants.   Un autre exemple de ceci a eu lieu lorsque Stéphane Richer et Michael Landsbergh ont parlé, sur TSN de leur dépression respective.   Pendant 24 heures, à travers tout le Canada, les lignes de soutien aux hommes ou de services de crises ont été inondées d’appel de la part d’homme demandant de l’aide, voulant obtenir du support.   Lorsque la personne qui prend la parole a vécu des difficultés, elle peut mieux influencer celui, celle à qui elle s’adresse. Même chose lors  de levée fonds: ceux qui veulent s’impliquer ont besoin de pouvoir s’identifier à une personne jeune, engagée.
Stratégies
Être au Douglas, une aide…? Nécessairement oui.   Juste le nom du Douglas nous donne une crédibilité, avant même qu’on ouvre la bouche.   Il faut ensuite prouver qu’on mérite cette crédibilité.   Être dans un grand centre vous permet aussi d’avoir accès à de la recherche, des traitements de pointe.   Nous sommes riches au Douglas, à McGill, comparé à des centres plus petits ou des organismes communautaires.
… une entrave? Douglas est sur spécialisé, il est donc plus loin des besoins de la population.   On sait que ce sont les actions plus près de la personne, dans sa communauté, qui ont plus de chances de fonctionner.   Un autre questionnement que comme institution nous devons faire est de clarifier ce qui influence le plus les projets de recherche ou la priorisation de certains traitements: est-ce l’intérêt spécifique du chercheur ou les besoins populationnels auxquels on tente de répondre?   La recherche a encore beaucoup à faire avant d’être près de la clinique.
Quelle est la différence entre sensibiliser les professionnels de la santé et la population en général en ce qui a trait à la santé mentale des jeunes? En général, auprès des professionnels, la psychiatrie n’est pas très populaire.   Par exemple, les infirmières en urgence général témoignent souvent d’un sentiment d’incompétence envers la maladie mentale.   Elles ont choisi d’œuvrer en urgence parce qu’elles aiment aller vite, intervenir, gérer volume et acuité.   La maladie mentale est d’un autre domaine d’intensité.   Il demande plus l’accompagnement, un milieu sécurisant.   Pour la population en général, une barrière existe aussi, spontanément.   Si je suis dans un cocktail ou un événement social et que je dis « Mon fils a eu une leucémie l’an passé » comparé à « Ma fille a eu un diagnostic de schizophrénie l’an passé », nous sommes tous conscients que la première affirmation créera de la sympathie et de l’empathie.   La dernière information créera un certain malaise chez les personnes présentes qui, possiblement, tenteront de trouver un nouveau sujet… ou un nouveau groupe.   Mon expérience auprès de la population semble liée à une part de déni au début.   Vient ensuite la peur que ceci arrive à quelqu’un qu’on aime.   Si, comme « advocate », on réussit à avoir accès à leurs questions spécifiques qui leur permet d’ouvrir le dialogue sur la différence entre ce qu’ils croient être la maladie mentale et ce que c’est, on peut alors mieux sensibiliser les gens aux problématiques psychiatriques.
Media et technologies
Quelles sont les avantages et les limites des médias sociaux en termes de sensibilisation à la santé mentale des jeunes? La façon des jeunes de communiquer est un indicateur d’utilisation de ces médias. L’accès à un grand volume d’information et la possibilité d’utiliser ces nouvelles technologies pour mieux répondre aux besoins de la clientèle, comme ce psychologue qui débute la thérapie avec Skype pour les problèmes de phobie sociale sont parmi les avantages, la possibilité de multiplier le nombre de gens sensibilisé par un événement ou une nouvelle est aussi un avantage.   Toutefois, le volume d’informations qui alimentent continuellement les réseaux sociaux est un constant défi pour ceux dont le travail est la sensibilisation envers une cause.   Un autre exemple de limites est dans la capacité à rejoindre la clientèle cible.   Même si dans les rapports mensuels, je peux me vanter que mon blogue soit lu en Europe ou dans des pays d’Afrique du Nord, les membres du Crossroads connaissent peu ou pas l’existence de ce blogue ou encore le volume important d’informations pertinentes que l’on retrouve sur le site du Douglas.
En fin de panel, j’ai aussi parlé de la difficulté des patients à parler de leurs expériences personnelles à des organismes comme la police.   Les gens ont souvent peur de l’impact sur une demande d’aide ultérieur s’ils demandent des explications ou encore, s’ils ont l’impression que cela ne changera rien de toute façon.
Durant la période de questions, une stagiaire en soins infirmiers de McGill qui est présentement en psychiatrie a voulu que je m’exprime sur le rejet d’une patiente dont elle avait été témoin dans un contexte où l’on minimisait la souffrance en parlant de manipulation.   J’ai expliqué que peu importe le milieu, certaines problématiques comme le trouble de personnalité limite ont un impact sur les intervenants et l’équipe et qu’une façon pour elle de dénouer l’impasse qu’elle vivait envers cette expérience était de trouver dans son milieu de stage, une infirmière qui partageait ses valeurs de « caring » et de lui en parler.   Et ceci même s’il s’agit d’une autre infirmière que sa préceptrice.

Il faisait très beau en sortant de McGill.   D’avoir vu autant de jeunes intéressés et impliqués dans cette réflexion m’a fait le plus grand bien.   Il y a de l’espoir et le 20 octobre prochain, je vais à nouveau côtoyer des gens qui s’engagent pour la santé mentale.   Cela fait le plus grand bien à la mienne.


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Catégorisé dans Interventions, Maladie mentale, Priorités, Santé mentale, Soutien, Stigma, Travail en psychiatrie, Vie quotidienne.

Publié le 08 oct 2013

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2 commentaires à S’impliquer pour les jeunes

  1. Dominique
    Le 11 oct 2013 à 14:23
    Répondre

    Ce que vous faites est merveilleux. Aidons nos jeunes.

    • Liette Desjardins
      Le 11 oct 2013 à 17:38
      Répondre

      Merci, c’est gentil. Ce genre de journée me donne beaucoup d’espoir face à l’avenir. Liette