Identité artistique: le comment

Cathy Moon que j’ai mentionné dans un billet précédent parle des deux côtés indissociables d’une pratique artistique, l’expression spontanée d’une part, l’importance d’une discipline d’autre part. Quoi! Discipline? Ouais! Discipline. Non seulement l’art thérapie n’est pas qu’expressivité débridée (ce qui serait anti-thérapeutique pour certains clients), la pratique artistique personnelle ne l’est pas plus.

Artiste: Leveck 2009

Créer implique du travail et souvent un dur labeur face aux défis, frustrations et ratés. Il faut concentrer son temps, son énergie et son attention, et faire un certain effort pour mettre en forme une idée, un concept, une image.  Une pratique disciplinée développe une relation de confiance avec le processus de création, un processus qui est une relation à soi et qui passe par la matérialité des moyens utilisés. À force de pratiquer encore et encore, on apprend à apprivoiser l’inconnu, à faire confiance à nos sens qui guident les choix.  Certains aspects de la pratique s’apprivoisent et deviennent des alliés qui la soutiennent.

Une pratique disciplinée implique une structure qui correspond à qui l’on est. Pour quelqu’un qui travaille 50 heures par semaine, on peut comprendre que deux jours de fin de semaine à s’enfermer dans un atelier n’est peut-être pas la meilleure solution surtout si l’artiste a une famille. Il faut donc adapter sa pratique à sa réalité.

Cathy Moon s’adresse aux art-thérapeutes pour leur proposer des solutions dans leur milieu du travail:

  • Se trouver un partenaire artistique pour peindre ensemble à l’heure du lunch
  • Créer un groupe de soutien pour artistes
  • Avoir un journal visuel ou un cahier de croquis à portée de la main pour prendre des pauses dessin plutôt que des pauses cigarette ou café  (c’est meilleur pour la santé!)

De mon côté, dans mon milieu de travail en pédopsychiatrie:

  • j’ai créé un groupe de ressourcement par les arts qui se réunissait une fois par semaine pendant 90 minutes dans mes locaux d’art thérapie. C’était un lieu de partage de nos explorations artistiques, d’apprentissage de nouvelles techniques, mais surtout une sorte d’oasis pour les participants qui vivaient parfois des situations stressantes.
  • J’ai lancé une activité de créativité ouverte à tous, par le biais d’enveloppes de correspondance interne personnalisées.  Ca n’a pas été un grand succès. Je crois que peu de gens ont compris ou ont pris le temps d’y participer. C’est ça, les idées créatives! Elles ne peuvent pas toutes prendre! Il faudra que je mène une enquête sur le sujet lorsque j’aurai un moment.
  • J’ai installé une petite vitrine sur ma porte de bureau pour exposer mes nouvelles créations et explorations artistiques. J’aurai une vraie de vraie vitrine sous peu sur le mur voisin.
  • Je tiens ce blogue et y affiche certaines de mes créations.
  • J’ai créé un projet de marionnettes pour les jeunes (nous avons fait les marionnettes et les décors) Je vous en dirai davantage plus tard.

Dans son blogue, une art-thérapeute qui conserve son anonymat donne la liste de ce qu’il faut faire pour maintenir sa pratique artistique en santé:

  • Se réserver des moments de créativité tout au long de la journée (ne pas attendre d’avoir un idéal de x nombre d’heures).
  • Ignorer certaines tâches dites importantes; tout est important je le sais, mais la vaiselle peut attendre de temps en temps!
  • Établir son horaire de manière à gagner du temps, prévoir des rendez-vous avec soi-même.

Enfin, la suggestion que je trouve particulièrement pertinente:

  • Élargir sa définition du concept de créativité: classer ses fils à broder, prendre le temps de choisir son matériel d’artiste, feuilleter des magazines qui nous inspirent, aller au musée, etc., sont autant d’activités favorables à la création.  Lire les réponses plus détaillées ici.

Nourrir son inspiration est un autre aspect fondamental. J’en ai déjà parlé ici. Depuis quelques années:

  • Je suis abonnée à plusieurs magazines:Cloth, paper, scissors; Quilting Arts; FiberArts; BorderCrossings.  Je feuillette Selvedge (trop cher pour mon budget). Je lis Connaissances des Arts et feuillette une foule d’autres magazines d’art quand je passe par la biblio ou encore chez mon marchand de journaux. J’avoue toutefois que certains magazines d’art m’ennuient. De temps à autre j’en achète un, mais rarement le même. Il a aussi ArtDolls quarterly que j’achète de temps à autre. Les publications de  Stampington & company offrent une foule de projets et de tutoriels qui m’inspirent parfois.
  • Je souscris à un nombre impressionnant de blogues sur la créativité, la création textile, la peinture abstraite, le dessin, les techniques mixtes que je lis via mon IPod Touch ou encore mon lecteur de fils rss sur mon ordi quand j’ai un moment… commode ce Ipod pour ce genre de lecture rapide. Faut pas se leurrer non plus, je ne les lis pas tous, ni tout le temps.
  • J’écoute aussi des podcasts sur l’histoire de l’art, le processus de création de certains artistes en art visuel, sur la créativité, l’éthique de la création, des entrevues avec des enseignants en art, etc.  Quand? Quand je lave la vaisselle (pas de lave-vaisselle), que je passe l’aspirateur, me promène à vélo, ou encore en voiture (grâce à un gadget qui transfère l’audio à la radio).
  • Je suis abonnée à un grand nombre de forums de discussion qui parlent de pratique et offrent des conseils techniques: alteredbooks, artEzine, complex cloth, art techniquesbook arts, collage, ink-jet transfers, latest trends in mixed media. J’aime leurs archives et leurs fichiers techniques car ils sont compilés par des artistes.
  • Je suis une fana d’Amazon.ca  pour tous les livres, notamment ceux sur les techniques artistiques (leurs prix sont difficiles à battre). Chapters.ca est aussi intéressant, mais je préfère de beaucoup Amazon. Je ferai un billet à part pour les livres favoris de cette année.
  • Je vais au musée ou aux expositions avec des amis: vu Andy Warhol (MBA), Sophie Calle(CAT), Sympathie for the devil (MAC), Cuba Art et histoire (MBA) et plusieurs expositions de personnes que je connais.

Et la pratique.. Pour rester dans le bain du faire et continuer mon apprentissage je prends divers cours. Cette année j’ai suivi les cours suivants:

  • Juin 2008: un atelier d’imprimerie avec Bernice Sorge, artiste et art thérapeute
  • Août 2008:  une ‘retraite’ artistique d’une semaine intensive de ‘watermedia’ avec Douglas Walton durant mes vacances (voir les installations avec Bed and Breakfast juste à côté vraiment chouette.) Lynn Connell qui est peintre et gère cette entreprise depuis 14 ans déjà est vraiment extraordinaire, avec yoga et excellente bouffe.
  • Sept. 2008 deux ateliers de poupées thérapeutiques A) fabrication en tissu et B)  carton articulé
  • Sept à déc 2008: un atelier de peinture abstraite avec l’artiste Nicole Lebel au Centre des Arts Visuels
  • Hiver 2009 : ateliers d’un jour au papier japonais:  a) marbrure, b) papier washi, c) peinture/encres sur papier japonais
  • Mai 2009: j’ai fait partie d’un groupe de création (12 semaines) animé par une collègue art thérapeute par internet. Le thème: Resilience, transformation and art. Une directive définissait le ’défi artistique’ de la semaine dont les résultats étaient partagés entre nous par photos numériques sur le site. Plusieurs des participant(e)s étaient art thérapeutes et d’après les partages, cherchaient un moyen de nourrir leur propre créativité.
  • Au mois d’août 2009 je pars pour une ile à la frontière du Maine faire du ‘plein air painting’ c’est-à-dire du paysage en direct au pastel sec; médium que je connais plutôt mal mais j’aime relever ces défis créatifs.  J’espère que la pluie aura déversé toutes ses gouttes d’ici là.

Et bien sûr,  il y tous ces cahiers remplis de mes explorations de toutes sortes, en plus de tout ce qui a été créé durant l’année. En haut de ce billet mon dernier pastel, question de pratiquer un peu avant de partir en aoûtt. Ci-contre un ‘close-up de ce même pastel.

De toute évidence, je prend cet aspect de mon identité professionnelle au sérieux. En faisant ce bilan je réalise que 2008 -2009 a été une année plutôt boulimique du côté artistique. La liste vous donne un aperçu de la variété possible des activités qui peuvent nourrir la pratique artistique.

Et vous comment ça se passe de votre côté?


Classé dans , , , , , , , , .

Catégorisé dans Arts, Création.

Publié le 21 juil 2009

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>

4

Un commentaire à Identité artistique: le comment

  1. Celine G
    Le 24 juil 2009 à 16:51
    Répondre

    Bonjour Francine, tout à fait remarquable la toile et chanceuse d’avoir autant de temps pour tremper dans la création.

    Cet article est particulièrement passionnant, il révèle avec justesse les deux côtés de la pratique de l’art et qu’il est impensable de croire que la création est quelque chose qui arrive automatiquement sur le bout du pinceau comme-ça au hazard.

    Tout artiste professionnel a une démarche et la création de ses oeuvres passe obligatoirement par la mise en place des lois inhérantes à la pratique des arts, de l’utilisation qu’il en fait et de la hirarchisation qu’il en fait.

    Pour ma part, j’ai ma petite école et je reçois de petits groupes, l’orientation est esthétique uniquement je n’ai acune formation en art thérapie (pas de Jojo VanGogh pour moi). Il arrive trop souvent que des artistes se donne un gros diplome de thérapeute et font ressortir toutes les qualités et défauts du monde à travers l,oeuvre de leurs participants sous prétexte qu’ils utilisent un peu plus de rouge que de bleu ou de blanc..etc .ah..ah..ah je ne comprends pas qu’on crois à celà.

    Mes étudiants (participants à mes ateliers) sont libre d’utiliser le médium de leur choix pour réaliser l’oeuvre de leur choix également. je ne fais que les pousser dans leurs retranchements vers leur zone de plaisir à créer et réaliser des choses qu’ils ne croyaient pas pouvoir faire…ce qui leur donne de la fierté et de la confiance en soi porteuse de bonheur.

    Pour ma part, voici ma démarche
    « L’ébauche est réalisée dans un mouvement ample, instantané, presque impatient, mais obligatoire et fondamental où la résonance florale n’est qu’un prétexte au geste rond et à la couleur débridée; puis, peu à peu, de la superposition des couleurs naît le reflet de la matière picturale quasiment habitée, finalement, advient l’analyse soutenue dévoilant l’œuvre en l’imprégnant d’une solide composition esthétique et artistique. »

    Actuellement, je fais des tubes avec un très grand plaisir, il s’agit de sonotubes de diamètres variés maroufflés d’ue toile enduite de gesso. Il devient intéressant de tourner autour du subjectile sann trop savoir ce qu’il y a avant et même après. Le mouvement devient obligatoirement plus court et rapide (il n’y a plus de toile sous mon mouvement). Je dois prévoir les majeures et laisser libre court aux mineurs (faire confiance…devient primordial).

    Au plaisir de te relire

    Céline G